Résumé :
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Comment le savoir universitaire établi parvient-il progressivement à accepter des systèmes de référence différents, étrangers, à faire de cette différence l'objet d'un discours savant ? On ne peut répondre à cette question qu'en analysant la naissance, le développement et la disparition des chaires de littérature étrangère, au sens large du terme " littérature " dans la France du XIXe siècle. Bien que cet enseignement couvre en principe l'ensemble indifférencié des cultures européennes s'opposant à la France comme l'altérité à l'identité, la nature des méthodes utilisées, la personnalité des professeurs nommés et leur itinéraire biographique montrent que la référence allemande a la valeur d'un point fixe, d'un prisme universel à travers lequel seul peut être envisagée la pluralité des cultures. Sous l'effet de ce " paradigme de l'étranger " s'affirme vers la fin du siècle une segmentation des aires culturelles. L'histoire des études allemandes, anglaises, espagnoles, italiennes et slaves s'amorce, mais aussi celle de la philosophie romane ou des études comparées. C'est en fait toute la perception intellectuelle de l'étranger dans ses relations avec l'Allemagne qui se joue dans un chapitre central de l'histoire des sciences humaines.
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