Résumé :
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On a défini l’ouvre romanesque de Vigny comme un océan de projets d’où émergent des îles (Cinq-Mars, Stello, Servitude et grandeur militaires) et des îlots (Scènes du désert, Daphné). Nuançons. L’imaginaire de Vigny ne se disperse pas : divers seulement dans les formes qu’il se donne, il explore un monde cohérent, aux valeurs constantes. Elevé dans le culte des rois alors que ceux-ci sont détrônés, officier dans un temps où la gloire est une passion inutile, Vigny est fasciné par la faillite des aspirations humaines, par la Providence (nouveau nom de la Fatalité antique), par la Destinée : ses ouvrages sont les moments successifs d’une «étude du destin général des sociétés» qui élève ses héros à la puissance idéale. Cinq-Mars le noble, Stello le poète, Renaud l’un des soldats de Servitude, illustrent l’opinion suivant laquelle il est salutaire de n’avoir pas d’espérance ; les ombres mêmes que le Docteur-Noir réveille pour Stello sont celles de poètes morts avant que la réalité ait pu se prêter à leurs espoirs. Tous, et Vigny, sont les passagers d’un monde où, depuis la mort de l’espérance, l’honneur est la seule religion vivante.
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